En Occident, on se représente encore et toujours l'Islam, de manière consciente ou non, comme la religion des autres, ces presque sauvages qu'il fallait civiliser.
Quand bien même les musulmans s'évertuent à dire que l'Islam n'a rien de commun avec cette voie suicidaire et obscurantiste, l'intégrisme renforce cette représentation et comme dans une alliance objective les occidentaux laissent les intégristes poser les règles du débat et reprennent les paroles altérées et apocryphes du Coran.
Présenter l'intégrisme comme l'application littérale de l'Islam, c'est se fourvoyer d'emblée.
Mais qui a vu les Bouddhas de Bamiyan dynamités et les massacres quotidiens d'innocents a du mal à ne pas souscrire à ce préjugé !
Cette erreur due à l'ignorance sert et cautionne l'intégrisme et ses procédés d'endoctrinement aveugles.
L'intégriste instrumentalise l'Islam afin de s'approprier l'autorité de cette religion pour s'ériger en autorité au-dessus de tous les hommes. Pour reprendre ce raisonnement sous forme syllogistique, si tant est qu'il y ait un raisonnement, les intégristes disent: « la religion c'est moi, fais ce que je dis sinon tu es un apostat ».
Un islamiste est-il un intégriste ?
L'islamiste est un musulman ou prétendument tel qui considère l'Islam non pas comme une religion mais comme un système social. C'est le fameux : « le Coran est notre constitution », comme les maoïstes le disaient du Petit Livre Rouge.
L'absence de liberté démocratique dans tous les pays musulmans - tous ! - a recruté des islamistes qui s'affirment dans une interprétation pernicieuse du Coran pour compenser leurs frustrations : « s'il y a des injustices dans le monde musulman, c'est parce que l'on n'a pas appliqué l'Islam à la lettre »... L'Islam qui gère tout, qui a réponse à tout, et qui a tout inventé...
Or, pour beaucoup de ces fanatiques il ne s'agit ni de lire ni d'écrire ni même d'épeler ce texte.
L'islamiste a une grille d'analyse politique souvent argumentée et son objectif final est de convaincre tout le monde que l'Islam est le meilleur moyen de faire régner la bonne gouvernance. Il n'est pas forcément violent, au contraire ses discours sont sirupeux, (voir le doucereux Tariq Ramadan et son ignoble frère), il se mêle aux autres et parfois y trouve des valeurs communes. Mais lorsqu'il est à côté d'un homme de bonnes mœurs, il dit : « c'est un musulman qui s'ignore ». L'intégriste réduit la religion à une ligne rouge, à un code établit selon ses propres critères qui sépare strictement « ce qui est bien » et « ce qui est mal ».
Autant dire, que, dans cette nébuleuse la frontière est bien floue dans ce manichéisme de supermarché. Il n'a pas de projet politique construit. Son seul programme, son seul credo, c'est l'extermination de tous ceux qui ne pensent pas comme lui. On peut donc être islamiste sans être intégriste et intégriste sans être islamiste, mais un islamiste peut devenir intégriste alors qu'un intégriste fait difficilement faire le chemin inverse.
Islamiste, intégriste, qui est le plus pernicieux ?
Les deux sont dangereux pour « le vivre ensemble », tout simplement parce qu'ils considèrent l'un et l'autre, en utilisant une lecture dévoyée, voire pas de lecture du tout, qu'un texte religieux détient à lui seul toute la vérité universelle. Cette cécité exclue tout être humain s'il ne passe pas par ce texte pour accéder à la vérité.
Très peu de partisans de cette vision totalitaire et atrabilaire connaissent ce texte, même si parfois ils le récitent de mémoire. Le discours intégriste fait autorité sur les plus fragiles et en particulier sur les jeunes en échec scolaire. Le jeune qui se ressent d'origine tunisienne, algérienne, marocaine, africaine ou indienne, est réconforté par son identité ethnique mais aussi par son appartenance locale : il est d'une ville, d'un quartier, c'est son territoire ! Il n'est que d'observer les tags et les voitures brûlées dans les quartiers périphériques des grandes villes pour s'en convaincre.
Ces jeunes ont leurs circuits, leurs commerces, leurs écoles, leurs lycées dans le quartier, et généralement ces lieux ne correspondent pas vraiment à un label de qualité malgré la récurrence des discours politiques et leur carence, de notoriété publique.
Tous ces jeunes se sentent en situation d'échec et à juste titre.
Les enseignants le constatent tous les jours. Le discours intégriste propose à ces jeunes en déshérence un espace de substitution virtuel au-dessus de tous les pays.
Il leur dit : « vous vous sentez de nulle part. En vérité je vous le dis, Dieu vous a élus pour être supérieurs aux Arabes, aux Américains et aux Européens ».
Cela transforme toutes ces frustrations en extase et en toute-puissance. Il n'est point besoin de psychanalyse pour comprendre cette arrogance et cette violence gratuite de la part de ces jeunes désorientés...
Comme les créationnistes qui sévissent dans les religions chrétiennes, les intégristes suppriment les références scientifiques et historiques pour créer un passé mythifié et manipulé.
Tous leurs discours se réfèrent directement au temps de la Révélation, avec l'avènement de l'Islam en 624 après J.-C., comme si rien n'avait existé avant. Ces jeunes se font facilement accrocher parce qu'ils sont déracinés, ils poussent comme des herbes folles dans les trous de mémoire semés dans le terreau empoisonné de l'intégrisme.
Le discours intégriste capte ces « particules volantes » par Internet, la rencontre physique n'a lieu que lorsque le jeune est bien ferré ou anesthésié. C'est tout comme.
Comment prévenir ce risque?
Pour affaiblir l'intégrisme et l'islamisme, il faut leur ôter leur justification religieuse. Alors que l'islamiste évoque des références religieuses tronquées pour parvenir à ses fins politiques, l'intégriste n'a que faire des discussions théologiques.
Car si l'on revient aux fondamentaux, on constate que l'Islam - littéralement, « la Paix » - apporté par le Coran n'a aucune tendance belliqueuse. Il doit au contraire faire sens dans le cœur des hommes à n'importe quel siècle et en n'importe quel lieu. Alors que l'Islam proscrit de porter atteinte à l'intégrité humaine, on nous rapporte tous les jours que des « martyrs » se font sauter en causant des carnages.
Alors que l'Islam proscrit le suicide, on constate aussi que tous ces désespérés sont très jeunes et pour la plupart n'ont pas suivi un cursus scolaire normal aboutissant à une insertion sociale.
Il faut donc :
- Redonner à ces jeunes une dignité perdue, car celui qui veut toute la place est celui qui n'a plus de place.
- Combler ces trous de mémoire si dévastateurs.
- Réancrer ces jeunes dans un espace territorial.
Même si cela ressemble à une gageure, il faut travailler simultanément dans deux directions :
- L'école doit sortir de son rôle de « bouche-trou ». Elle est perçue par beaucoup de ces jeunes comme une perte de temps puisqu'elle n'aboutit que rarement à une perspective professionnelle solide.
Il n'y a rien de plus décourageant pour un enseignant que d'entendre dire : « l'école ça ne sert à rien ».
Ce n'est plus : « travaille bien à l'école et tu réussiras », l'alternative devient le deal ou l'intégrisme. Il est frappant de constater que dans des quartiers où sévissent la drogue, le banditisme et la prostitution, l'intégrisme religieux est peu présent.
- L'autorité parentale se délite. Cette carence permet aux prédicateurs « gourous » de prendre leur place vacante auprès de jeunes qui ne respectent plus leurs parents déchus et qui, au lieu de rechercher une émancipation légitime, tombent dans le piège de l'intégrisme religieux.
Le chantier est immense, mais : « Que la lumière qui a éclairé nos travaux continue de briller en nous pour que nous achevions au dehors l'œuvre commencée dans la Loge » !
JPB
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